J’étais en Chine il y a peu de temps et je vais poster bientôt une note sur VESTASIA et CSPS.
En attendant j’ai traduit ci-dessous un article du journal Britannique Telegraph qui donne un état des lieux des différentes bulles chinoises. Les premiers signes d’un éclatement de la bulle immobilière semblent se manifester dans les grandes villes chinoises (Pékin, Shanghai…) avec des chutes de 30% à 40% dans l’immobilier neuf.
La Chine souffre des même maux que l’Europe et les Etats-Unis, excès de crédit, flambée des prix de l’immobilier, corruption, falsification des comptes et fuite des capitaux (ce qui est plus récent).
Certes la Chine possède beaucoup de réserves, mais elles sont en grande partie investies dans les obligations d’états US et Européenne (comme l’Allemagne d’ailleurs).
La question qui va se poser en 2012, c’est quelles mesures la Chine va-t-elle prendre pour traverser la dépression qui va frapper l’Europe et les Etats-Unis (les média nous saturent avec la crise européenne mais la situation aux Etats-Unis est bien pire) ? Le secteur manufacturier en Chine éprouve déjà de grandes difficultés et elles vont s’accroitre. La crainte esquissée dans l’article est que nous assistions à une guerre monétaire, la Chine va agir sur le Yuan, les entreprises faire du dumping pour écouler leur marchandise et les mesures protectionnistes réactivées - dans un article récent, la Chine annonçait une taxe sur les voitures importées par GM.
Il est difficile d'obtenir des données fiables en Chine, mais quelque chose cloche lorsque le site Web chinois « Homelink property » rapporte que les prix des logements neufs ont chuté de 35% à Beijing en Novembre par rapport au mois précédent.
Si cette information s’avère vraie, les actions planifiées par les autorités chinoises pour obtenir un atterrissage en douceur sont bien loin d’avoir les effets escomptés et la situation risque d’être bientôt hors de contrôle.
La croissance de la masse monétaire M2 a chuté à 12.7% en Novembre, le plus bas en 10 ans. Les demandes de nouveaux prêts ont chuté de 5% sur une base mensuelle. La banque centrale a commencé d’une part à inverser sa politique restrictive après avoir observé que les tensions inflationnistes s’apaisaient, et d’autre part à diminuer le montant des réserves obligatoires des prêteurs pour la première fois depuis 2008 pour atténuer les tensions sur les besoin en termes de liquidité.
La question maintenant est de savoir si la Banque populaire peut faire mieux que la Réserve fédérale américaine ou la Banque du Japon pour dégonfler la bulle du crédit.
Les bourses chinoises envoient des signaux inquiétants. L'indice de Shanghai a chuté 30% depuis mai.
Albert Edwards de la Société Générale déclare « Les investisseurs sous-estiment massivement le risque d'un atterrissage brutal en Chine, et il en est de même dans d’autres pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine) ... un ‘concept d'investissement ridicule qui peut s’avérer sanglant ‘ à mon avis »
«Les BRIC sont en train de chuter comme des briques et les crises sont destructrices, causées par leurs propres cycles d'expansion-dépression du crédit. La production industrielle est déjà en baisse en Inde et le Brésil devrait bientôt suivre. »
« Il y a une telle capacité de production disponible qu’ils vont commencer à faire du dumping sur les marchandises, risquant un choc déflationniste pour le reste du monde. L’annonce de la Chine d'imposer des tarifs sur les importations de voitures GM n’est pas une surprise. Je pense qu'il est très probable que la Chine dévalue le yuan l'année prochaine au risque de provoquer une guerre commerciale ».
Les réserves de change de la Chine, estimée à US$ 3,2 billions ont baissé durant ces trois mois, malgré l'excédent commercial. L'argent sort du pays. D’après Mr Li Yang, anciennement à la banque centrale « Les flux de capitaux entrants uniquement ou ceux pariant sur la hausse du yuan c’est du passé. Nos réserves de change sont en baisse de jour en jour ».
Cette diminution que nous constatons agit comme une forme de resserrement monétaire, exactement le contraire de l'effet observé lors du boom. Les réserves ne peuvent pas être exploitées pour soutenir le système bancaire de la Chine Continentale. Pour ce faire il faudrait rapatrier des capitaux – maintenant investis en bons du Trésor américain et en les obligations européennes - poussant le yuan à la hausse au plus mauvais moment.
L'économie est décalée. La consommation a baissé de 48% à 36% du PIB le pire depuis les années 1990. L'investissement lui a augmenté à hauteur de 50% du PIB. Du jamais vu, même selon les normes du Japon, de la Corée ou de Taiwan lors de leur boom économique. Rien de tel n'a été vu auparavant dans les temps modernes.
D’après Charlene Chu, analyste pour Fitch Ratings, « La Chine est accroc au crédit, mais chaque dose a de moins en moins d’effet sur la dynamique du PIB. Un dollar supplémentaire sous forme de prêt augmentait le PIB de US$ 0,77 en 2007, il est de US$ 0,44 en 2011. La réalité est qu'aujourd'hui, l'économie chinoise a besoin de financement nettement plus pour atteindre le même niveau de croissance que dans le passé ».
Mme Chu note « l’usage d’effet de levier très important» et craint une « érosion structurelle» du système bancaire qui diffère des précédentes récessions. » Pour la première fois, un grand nombre de banques chinoises commencent à faire face à un manque de liquidité. La prochaine vague de questionnements quant à qualité des actifs détenus par les banques risque d’être plus douloureuse que lors de la dernière crise.
Les investisseurs pensaient la Chine était à l'abri d'un krach immobilier parce que la part de la finance hypothécaire est juste de 19% du PIB. Les riches chinois achètent souvent deux, trois appartements ou plus parce qu'ils ne peuvent pas investir à l'étranger et les taux des dépôts bancaires ont été de moins 3% en termes réels cette année.
Le professeur Patrick Chovanec de Beijing’s Tsinghua School of Economics a déclaré que le ralentissement a véritablement commencé en août, lorsque les entreprises de construction ont indiqué que les stocks d’invendus ont atteint 50 milliards de dollars. On assiste maintenant en «une spirale de baisse des attentes ».
Un sentiment de vente à tout prix est en cours dans les villes côtières, avec des promoteurs de Shanghai cassant les prix de 25% en Novembre - à la grande fureur des gens qui avaient acheté leur appartement plus tôt, qui s'attendent maintenant à un dédommagement. Et la panique se propage. Les ventes immobilières ont chuté 70% dans la ville intérieure de Changsa. Les prix ont chuté aurait 70% dans la «ville fantôme» d'Ordos en Mongolie Intérieure.
L’Index Immobilier officiel quant à lui indique que les prix ont chuté de seulement 0.3% dans le top 100 des plus grandes villes le mois dernier, mais cela ressemble plus à un indicateur retardé. Pendant ce temps, le ralentissement est rampant dans l’industrie de la construction. La production d'acier est en berne.
Pékin a réussi à contrer la crise mondiale en 2008-2009 en offrant les vannes du crédit, agissant comme un amortisseur pour le monde entier. Il est douteux que Pékin peut réutiliser cet artifice une seconde fois.
« Si les investisseurs veulent de la croissance à tout prix, il y a de grandes chances qu’ils découvrent que cela fonctionne encore moins bien qu'auparavant et l'inflation revient rapidement », a déclaré Diana Choyleva de Lombard Street Research.
Mr Zhu Min du Fonds monétaire international précise que les prêts en Chine ont doublé pour atteindre près de 200% du PIB au cours des cinq dernières années, y compris les prêts « off book ».
C'est environ le double (en volume) de la croissance du crédit dans les cinq années précédant la bulle sur l’indice japonais Nikkei dans la fin des années 1980 ou de la bulle immobilière américaine de 2002 à 2007. Chacun de ces booms a connu une croissance des prêts de l’ordre de 50 points de pourcentage du PIB.
Le FMI a déclaré en Novembre que les prêteurs faisaient face à une «constante accumulation de vulnérabilités dans le secteur financier », avertissement que si des chocs multiples frappaient l’économie chinoise, « le système bancaire pourrait être gravement touchés ».
Mark Williams de Capital Economics a déclaré que le grand espoir était que la Chine ferait usage de sa frénésie de crédit d’après 2008 pour acheter du temps, afin de passer d’une économie basée sur un surinvestissement chronique à une économie basée sur la consommation.
« Ca n'a pas fonctionné comme prévu. Les prochaines semaines sont susceptibles de révéler la que peu de progrès ont été réalisés. La Chine peut résister à la tempête au cours des prochains mois, mais les dangers et de la dette et de sur capacité ne feront que s'intensifier ».
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