Ben Bernanke a de quoi être très préoccupé en ce moment et
son cauchemar s’appelle le $TNX, le
rendement des taux long à 10 ans. L’objectif de Bernanke est de le maintenir à
3% au pire 3,5% au moment où j’écris cette note il est à 3.86% - il est fort
probable que s’il atteint ou flirte avec les 4% cela déclenche une réaction de
la part de la FED.
Il faut savoir qu’aux Etats-Unis, une grande majorité des
taux d’intérêts sur les prêts immobiliers, étudiants, entreprises… sont d’une
façon ou d’une autre lié au 10 year Treasury note ($TNX). Si le $TNX monte
alors les taux d’intérêts des emprunts aux particuliers et aux entreprises
montent également. Cela veut dire plus d’argent à rembourser pour un américain
moyen qui s’il n’a pas encore perdu sa maison ou son emploi tente de survivre.
Par conséquent l’argent qu’il met à rembourser ses prêts ne sera pas utilisé
pour faire tourner la machine à consommer que sont les Etats-Unis.
Le TNX au plus haut de l'année alors que l'objectif de la FED est de le garder le plus bas possible!
Voilà pour un aspect du problème, préoccupant mais
bon vous me direz – la reprise prendra un peu plus de temps … Certes, mais
il y a un autre aspect du problème bien plus grave celui là, c’est la chute des
rendements des bonds du trésor US à 5, 10 et 30 ans, résultat direct de la
hausse du $TNX.
Et là il y a un réèl problème car l’administration Obama
doit lever 2 000 milliards de dollars cette année afin de financer le plan de
relance budgétaire et le renflouement des banques. Elle doit trouver 900
milliards d’ici septembre (1). Et si les bonds du trésor US ne sont pas
suffisamment attractifs, il sera difficile de trouver des acheteurs et le risque
du Krach obligataire ne pourra plus être exclu !!!
Les États-Unis ne sont pas les seuls à faire face à un grave
déficit. Les gouvernements du monde entier devront lever 6 000 milliards de
dollars cette année, avec d’énormes volumes au Japon et en Europe. Kyle Bass,
de Hayman Advisors, estime que les marchés sont saturés par ces emprunts.
« Il n’y a pas assez de capitaux dans le monde pour acheter ces nouvelles
émissions de dette souveraine rendues nécessaires pour financer les
gigantesques déficits budgétaires que les gouvernements ont choisi de mettre en
oeuvre. Il n’y a tout simplement pas assez d’argent en circulation »,
juge-t-il. « Si les États-Unis perdent le contrôle des taux longs, ils ne
seront pas en mesure d’arrêter la baisse des prix des actifs. S’ils impriment
trop d’argent, ils vont dévaloriser le dollar et provoquer la stagflation
».
Et pour compliquer la situation, les commodities s’envolent comme le crude oil
qui a dépassé les 70$. Ironie de la situation Bloomberg
a appris que JP morgan affrète des tankers gorgés de pétrole qui attendent
patiemment que le prix du crude oil sugmente suffisamment pour pouvoir délivrer
leur cargaison – l’imagination spéculative n’a pas de limite (2). Et oui les
banques d’affaires américaines n’ont rien appris de la crise mais cela n’est
pas nouveau.
Et enfin de quoi donner des insomnies à Bernanke, le dollar
a baissé de 11%, par rapport à un panier de devises depuis le début de mars.
Les rumeurs sur une « crise du dollar » pourraient désormais contraindre la Fed
à vouloir soutenir le marché obligataire. Elle a acheté à ce jour 116 milliards
de bons du Trésor US, dans le cadre de sa campagne « d’assouplissement du
crédit », sur un total prévu de 300 milliards.
Maintenant pour revenir à la hausse du $TNX à quoi est-elle
due ? A une frilosité des acheteurs de la dette US, en partie. Les
banques centrales asiatiques et les exportateurs de pétrole du Moyen-Orient ont
réduit leurs achats d’obligations américaines et européennes en raison du
ralentissement de l’accumulation de leurs réserves. La Russie a réduit ses
avoirs en dollars d’un tiers afin de soutenir la croissance intérieure. Même
les fonds de pension de l’Etat japonais sont vendeurs net d’obligations pour la
première fois cette année.
Bernanke doit reprendre le contrôle des taux long pour
financer le déficit US et ensuite trouver les capitaux pour acheter les
obligations d’états US – rude tâche - où trouver les capitaux ? Et bien
sur le marché actions tout simplement. C’est à dire transférer (pomper sera
plus adéquat) les capitaux du marché actions vers le marché obligataire. Oui
cela veut dire une chute du marché actions vous avez bien compris. Mais si
Bernanke doit choisir entre un krach obligataire et un krach sur le marché
actions, il n’y a pas de doute sur son choix, il préservera le marché
obligataire.
Est-ce que ce scénario se réalisera, et si oui quand ?
Et bien surveiller le $TNX et les statistiques américaines. Si par hasard le
$TNX dépasse les 4% je ne serais pas surpris de voir des statistiques
soudainement moins bonnes que prévues…
Pour conclure voilà un dessin qui date un peu mais qui résume bien la situation, sauf que maintenant il faut ajouter d'autres fuites: bonds, commercial real estates, credit cards...
(1)
http://www.telegraph.co.uk/finance/financetopics/financialcrisis/5379733/US-bonds-sale-faces-market-resistance.html
(2)
http://www.reuters.com/article/marketsNews/idUSL365078320090603
Franchement bravo pour ces deux articles bien que le fond des textes me fasse froid dans le dos.
Si j'ai bien compris : si le $TNX dépasse les 4%, gare à la chute (dans un puits sans fond ?)des marchés actions.
Rédigé par : JMD | 07 juin 2009 à 19:01
Bonsoir jean Michel
Merci pour le compliment. Je ne suis pas un économiste mais j'aime bien revenir aux fondamentaux pour tenter d'appréhender la complexité de la situation. Bien que je comprenne que d'un point de vue psychologique il est important d’avoir un discours positif pour ne pas tomber dans le pessimisme, je désapprouve le discours ambiant qui vise à nous faire croire que le pire de la crise est derrière nous ! En effet pour prendre des décisions responsables, chaque individu doit connaître autant que faire ce peut la vérité.
La situation des Etats-Unis ne s’améliore pas, elle se dégrade, significativement, sur le front de l’emploi, des expropriations, des crédits dits sûr comme les ALT A, l’immobilier de bureaux… A cela s’ajoute maintenant les matières premières et les taux d’intérêts.
Autre signe d’inquiétude, Bill Gross, gérant du fond PIMCO – 150 Milliards d’actif quand même, personnage très écouté - est passé vendeur sur le dollar.
Les chinois sont les seuls à manifester leur crainte ouvertement, avec l’Allemagne parfois.
Maintenant combien de temps le marché actions va pouvoir léviter comme il le fait actuellement – je ne sais pas. Il y aura un autre test la semaine prochaine car les US vont mettre aux enchères une nouvelle tranche de T-bonds.
Rédigé par : Fabrice | 07 juin 2009 à 23:41