La Chine menace la FED et se gausse du secrétaire d’état au trésor américain, une première ! (1er partie)

La situation est inédite et mérite qu’on s’y attarde ! La diplomatie chinoise est reconnue pour ses ellipses, circonvolutions empruntent d’une apparente cordialité parfois pouvant allés jusqu’à l’obséquiosité. Et seule une personne rompue aux us et coutumes chinoises est à même de décoder ce langage et d’y répondre.

 Bref  le verbe haut, l’ironie, la menace, la colère feinte, tout cela est étranger à un diplomate chinois, enfin je dois plutôt dire était car les choses ont bien changées avec Hu Jintao.

La France en a fait les frais il n’y a pas très longtemps avec l’épisode Tibétain. Maintenant c’est au tour des Etats-Unis.

Observons la chaine des événements depuis le mois de Mai.

Durant le mois de Mai, la Chine a fait part de sa préoccupation concernant la politique budgétaire américaines via des déclarations officielles. Néanmoins au fil des déclarations, la Chine s'interrogeait ouvertement sur la bonne/mauvaise santé de l'économie américaine - ce qui a conduit Timothy Geithner a se déplacer en Chine pour  « rassurer ».

Le 1^er Juin alors que de Timothy Geithner, secrétaire d’état américain au Trésor était à peine arrivé en Chine, (oui le hasard n’y est pour rien), Yu Yongding, un ancien conseiller de banque centrale chinoise déclare « Une autre crise financière mondiale déclenchée par une perte de confiance dans le dollar est inévitable à moins que les États-Unis économise davantage » (*).

Timothy Geithner affirme que l'administration Obama vise à réduire le déficit budgétaire à environ 3 % du produit intérieur brut sachant que cette année le déficit est estimé à 12,9 % du PIB. Puis il renchéri en ajoutant que les investissements chinois en actifs financiers américains sont très sûrs, et que l'administration Obama s'est engagée à soutenir un dollar fort.

Yu Yongding,  toujours lui, a répliqué « qu’il serait utile que Geithner nous (la Chine) explique quelle arithmétique il utilise car nous avons besoin de savoir comment le gouvernement des États-Unis peut atteindre cet objectif. » Oui vous avez bien lu, place à l’impertinence.

Il est vrai que le déficit de l’année en cours et qui se termine le 30 septembre est estimé à $ 1,75 billions comparé à celui de l’année dernière qui « n’était » que 455 milliards de dollars selon la section du Budget du congrès.

A cela il faut rajouter une baisse de 34% des recettes fiscales  au niveau fédéral, du jamais vu depuis 1981 (**).

Yu Yongding  se positionnant en donneur de leçons déclare ensuite que « Les États-Unis ont besoin d'un taux d'épargne élevé et d’un plus petit déficit du compte courant,  ou bien une autre crise financière déclenchée par une défiance dans le dollar pourrait être inévitable ».

Exercice difficile – même impossible - pour un pays dont 80% du PIB est lié à la consommation. Si l’américain moyen ne s’endette plus mais au contraire épargne de plus en plus alors c’est une chute de plusieurs points de PIB ! Par ailleurs les pays exportateurs – dont la Chine - vers les Etats-Unis se trouveraient en mauvaise posture également.

La Chine est aujourd’hui le plus grand détenteur de bond du Trésor US pour un montant de $ 768 milliards de dollars (Mars) les autres créanciers étant le Japon, la Corée du Sud et les pays du golfe.

Un peu avant le sommet du G20, la Chine avait déjà montré son inquiétude en proposant par l’intermédiaire du Gouverneur de la Banque centrale Zhaou Xiaochuan une nouvelle monnaie mondiale pour réduire la dépendance vis-à-vis du dollar.  Premier signe de l’impertinence chinoise qui se heurta à un « non » ferme de la part de l’administration Obama.

Ensuite dans son article Yu Yongding  (d’après moi) en vient au sujet de préoccupation principal de la Chine (et elle n’est certainement pas la seule)  « y aura t-il assez de liquidité pour acheter les bons du trésor des États-Unis cette année ? ». Et oui il faut savoir qu’au total, ce sont 6000 milliards de dollars que les pays du monde entier devront lever cette année mais j’y reviendrais dans la deuxième partie de cet article.

Et pour finir le coup de grâce en se référant à la Réserve fédérale, Yu la considère  « comme le plus grand investisseur en actifs pourris » et il s’inquiète « de l’expansion astronomique du bilan de la réserve fédéral et du fait qu’elle ait acquis des actifs toxiques invendables», et au Président Ben S. Bernanke, en l’appelant par son sobriquet « Helipcoter Ben ou Ben hélicoptère », sobriquet attribué à Ben Bernanke par Wall Street à cause de sa  façon de gérer la crise actuelle en inondant les marchés de dollars.

Les choses sont dites sans ménagement, c’est le moins que l’on puisse dire. Je dois reconnaître qu’il a le mérite de dire tout haut ce que beaucoup chuchotent à l’abri des regards.

Le 2 Juin, Timothy Geithner s’est adressé à un parterre t’étudiants à qui il a vanté la solidité de l’économie américaines. En réponse, il a reçu questions provocantes suivies de sourires ironiques et satisfaits.

Et oui, c’est une première, Timothy Geithner s’est exposé aux quolibets et moqueries tant de la part t’étudiants – ne comprenant pas grands choses à la situation mais agissant avec la bénédiction des autorités supérieures - que de la part de hauts représentants du gouvernement central – qui eux ont directement exprimés leurs préoccupations.

La réponse aux préoccupations chinoises n’a pas tardé car le Mercredi 3 Juin c’est au tour du patron de la Fed, Ben Bernanke, d’intervenir pour demander au congrès un meilleur contrôle du déficit budgétaire.

Au-delà du budget ce qui est préoccupant c’est la courbe des T-bonds à 10 ans qui s’envole et surtout les fissures qui apparaissent dans la confiance des investisseurs à acheter les bonds du trésor US et j'ai bien peur que le marché actions soit sacrifié sur l'autel du marché des obligations d'états.

Je m’expliquerais dans la deuxième partie de cet article.

(*) source Bloomberg – article de Kevin Hamlin et Li Yanping

(**) source: American Institute for Economic Research