Un article paru sur le blog
« israelfinancialexpert.blogspot.com » suscite beaucoup de
commentaires sur la toile. Commençons par le titre: “the secret engine behind
China’s housing bubble – the Ponzi shark loan finance.” L’idée étant que la bulle immobilière serait financée par une pyramide de
Ponzi basée sur des « prêts requins ».
Bon maintenant il faut décoder les
termes utilisés, Ponzi je pense que vous connaissez tous le principe, le
dernier exemple spectaculaire relaté par la presse étant l’affaire Madoff. Les « shark loans » - que je
traduirais littéralement par « prêts requins » - sont pratiqués par
des organisations mafieuses dont le principe consiste à mettre le contracteur
du prêt dans la situation ou il sera obligé de travailler essentiellement pour payer les
intérêts de son prêt – idéalement toute votre vie – et si ce dernier se rebelle–
il recevra la visite de « gros bras » qui lui feront très vite comprendre
que c’est dans son intérêt de payer ses dettes.
Ensuite lisons l’article pour comprendre
ce qui se cache derrière ce titre accrocheur. Je vous engage également à
visualiser cette excellente vidéo qui décrit très précisément comment
fonctionne les « shark loans »
en Chine : Shark Loan Phenomenon
Le fonctionnement est le suivant, des
individus empruntent à la banque des sommes conséquentes. Dans les exemples
cités, il s’agit de propriétaires de biens immobiliers, en général acquis avant
la création de la bulle immobilière, qui empruntent des sommes gagées sur la
valeur actuelle de leur bien très largement supérieure au prix d’achat.
Ensuite ils donnent cet argent à des entreprises,
oui disons le comme cela, spécialisées
dans les prêts requins. Ces entreprises promettent un rendement très élevé, de
20% à 50%, et parfois même plus. Avec
les sommes versées, ces entreprises financent en général des projets
immobiliers.
L’article souligne également la
corruption des gouvernements provinciaux qui reçoivent des pots de vin en échange de prêts
permettant aux entreprises « prêts requins » à opérer sous leur
juridiction. Certains d'entre eux sont mêmes des partenaires actifs dans les
entreprises « prêts requins ».
Une fois les appartements vendus, les agents
immobiliers remboursent avec les intérêts les entreprises « prêts requins »
qui reversent ensuite des intérêts aux prêteurs.
Tout cela fonctionne tant que l’immobilier
est à la hausse.
L’article cite l’exemple d’une personne qui a une sœur qui
pratique cette activité : «Ma province natale est le Zhejiang, maintenant
je vis à Shanghai. Jai une sœur qui a vécu à Hangzhou où elle a acheté sa maison
près de 500,0000 RMB il ya cinq ans. Maintenant sa maison vaut près de 2 Millions
de RMB, ce qui lui a permis d’obtenir un
prêt très conséquent à la banque. Elle a donné ce prêt à une entreprise « prêts
requins » avec une promesse de retour sur investissement de 30% chaque
année. Cela fait 4 ans maintenant qu’elle vit de cette activité. Elle est
professeur de collège avec un salaire de 4000 RMB par mois, mais avec ce mécanisme
de prêt requin elle gagne plus de 6 fois
son salaire annuel. Un cousin de mon père a perdu 4 millions de dollars suite à la faillite
d’une de ses entreprises de prêts requins en 2008. C'est mon expérience
personnelle. ... »
Il est
important de noter que le buzz autour des prêts requins en Chine provient des
blogs chinois. Rien de tout cela ne transpire dans la presse officielle ni même
dans les journaux d’investigations.
J’ai donc
demandé à mes amis chinois de quoi il en retourne et unanimement ils m’ont fait
part de leur scepticisme. Disons peut être que cela existe mais pour
l’essentiel l’argent qui nourrit la bulle immobilière vient du gouvernement et
des banques (donc du gouvernement).
Néanmoins cela
leur a permis d’évoquer le fait que les chinois se prêtent de l’argent entre
eux et cela représente un marché financier parallèle dont l’ampleur est quasi impossible
à estimer. L’utilisation de la carte de crédit reste marginale en Chine, le
privilège d’un classe moyenne haute (salaire mensuel minimum de l’ordre de
15000 RMB) encore très minoritaire. Pour l’essentiel les chinois préfèrent
l’argent liquide et ils le gardent chez eux car ils accordent une confiance
toute relative à leur système bancaire.
Dès lors que
l’un d’eux doit acheter une voiture ou bien faire l’acquisition d’un bien
immobilier (l’apport personnel est de l’ordre 20% à 30% du prix du bien
immobilier) il emprunte à sa famille ou bien à ses amis. C’est la confiance qui
scelle la transaction, il n’y a pas de contrat écrit.
Cette réalité rend
l’économie chinoise plus fragile qu’il n’y parait. Une chute de 40% à 50% du prix
de l’immobilier, comme on commence à la voir dans certaines villes, aura des conséquences
bien plus dramatiques qu’on ne pourrait le penser à première vue. En effet, c’est
toute une économie parallèle qui sera touchée de plein fouet avec des ruines et
des drames individuels à n’en plus finir.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.